L’équilibre d’Hardy-Weinberg est le modèle théorique de référence de la génétique des populations qu’il n’est pas toujours aisé à faire maîtriser aux lycéens. Hervé Kempf, professeur de SVT au lycée de l’Elorn à Landerneau (29), propose un site nommé forces évolutives « pour comprendre la loi d’Hardy et Weinberg et tester les effets des forces évolutives sur la fréquence allélique ». Avec cette interface disponible librement, les lycéens peuvent aussi suivre l’évolution des génotypes au cours du temps. « A terme seront également modélisés l’échantillonnage et les équations de prédation de Lotka-Volterra », annonce l’enseignant qui constate qu’il était « urgent d’intégrer des mathématiques dans l’enseignement des SVT car elles constituent, avec l’informatique et le codage, un outil quotidien d’un biologiste ou d’un géologue ».
Qu’est ce qui est proposé sur votre nouveau site à propos du modèle Hardy-Weinberg ?
Le site « Forces Evolutives » des SVT du lycée de l’Elorn de Landerneau permet aux élèves de terminale de comprendre l’équilibre de Hardy et Weinberg, une loi qui décrit connaissant l’effectif et la fréquence des allèles, l’évolution génotypique d’une population sans force évolutive (mutation, sélection naturelle, consanguinité …). Une fois ce concept assimilé, ce site explique, et modélise, l’impact de chaque force évolutive sur l’évolution des génotypes.
Nous avons aussi expliqué et modélisé quelques notions statistiques, comme la notion d’échantillonnage et de test du Chi2 (Khi2), qui permettent à l’élève de mieux comprendre comment les mathématiques aident la biologie dans la prise de décision. Nous avons aussi repris tous ces concepts dans une vidéo compréhensible par les élèves de Terminale disponible sur YouTube.
Du point de vue de l’élève, il peut utiliser le site pour comprendre la loi d’Hardy et Weinberg et tester les effets des forces évolutives sur la fréquence allélique. Il peut aussi suivre l’évolution des génotypes au cours du temps, ce qui à notre connaissance est une première sur un site pédagogique, à travers un ensemble de graphes simples. Enfin, il a accès automatiquement aux résultats du test du Chi2 sur les populations qu’il a modélisé afin de savoir si oui ou non, ses populations sont à l’équilibre de Hardy et Weinberg.
L’élève peut faire varier le nombre de simulations (= nombre de populations) qui évoluent simultanément de 1 à 200; le nombre de générations de 1 à 3000 ; la fréquence initiale des allèles de 0 à 1 ; l’effectif de la population de 1 à 1 000 000 000 ; le taux de mutation des allèles ; le taux de consanguinité et la valeur sélective de chaque individu (impliqué dans la sélection naturelle).
Comment les élèves peuvent-ils utiliser le site ?
Nos élèves disposent de nombreuses données sur des populations trouvées dans des publications ou obtenues par notre équipe à partir desquelles ils vérifient par eux-mêmes avec le test du Chi2 si la population suit l’équilibre de Hardy et Weinberg. Ils peuvent ensuite confirmer leur résultat directement avec le calculateur intégré au site « Forces Evolutives »
Si la population ne suit pas l’équilibre de Hardy-Weinberg, ils émettent une hypothèse sur la force évolutive qui fait varier les fréquences génotypiques et testent leur hypothèse avec la page modélisation en choisissant dérive génétique, mutation, sélection naturelle, consanguinité ou insularité (disponible bientôt sur le site).
Pourquoi une vidéo explicative ?
La loi d’Hardy et Weinberg et le test du Chi2 semblent poser des problèmes à beaucoup d’élèves mais également à certains enseignants. Nous avons voulu expliquer le plus simplement possible ces deux concepts, sans lequel on ne peut pas travailler sur l’évolution des populations. Même s’il existe d’autres tests statistiques, nous avons mis l’accent sur le test du Chi2 car il correspondait bien au problème. Par ailleurs, si on prend le temps de l’expliquer, il n’est pas si compliqué que cela à comprendre.
De plus ce test peut être réutilisé dans de nombreux contextes. Par exemple, nous l’utilisons pour valider le hasard dans le comptage des drosophiles ou des grains de maïs en génétique mendélienne classique. Ironiquement Mendel ne connaissait pas ce test, mais il aurait été très pertinent de l’utiliser dans ses recherches. Pour nos élèves les plus en difficulté, cette vidéo a été un véritable plus vérifié lors des évaluations.
Des évolutions attendues prochainement ?
Sur le site, un élève pourra bientôt simuler l’évolution des fréquences alléliques et génotypiques d’une population infinie. Même si cela n’a aucun sens en biologie (ou les populations ne sont jamais infinies), nous pensons que cela pourrait permettre aux élèves de mieux comprendre. Nous devons aussi rajouter la force évolutive de l’insularité avec un modèle ile-continent.
Par ailleurs, nous sommes en train de tester le génotype de nos élèves de Terminale par rapport à deux gènes différents avec PCR et électrophorèse de leur ADN pour obtenir des données génotypiques et les traiter par rapport à l’équilibre de Hardy et Weinberg. Nous sommes également en contact avec des chercheurs pour obtenir des données sur diverses populations et les traiter. Grâce à ces résultats, nous pourront partager des études de cas dans la page « Exercices » du site, que d’autres enseignants pourront utiliser comme contenu pédagogique.
Quel regard avez-vous sur les nouvelles notions concernant l’évaluation de la biodiversité enseignée au lycée ?
L’évaluation de la biodiversité d’une population commence par des échantillonnages sur le terrain suivis de génotypages en laboratoire. Il devenait urgent d’intégrer des mathématiques dans l’enseignement des SVT car elles constituent, avec l’informatique et le codage, un outil quotidien d’un biologiste ou d’un géologue.